Optimistes ou pessimistes

Dans une récente émission de la Grande librairie, l’écrivain français Emmanuel Carrère, parlant de l’état du monde, relevait qu’il y a les raisonnablement optimistes et les radicalement pessimistes.

Il est vrai que l’actualité est horrifiante. Des guerres, des massacres, des dictatures qui durent et d’autres qui s’instaurent, une situation climatique qui s’aggrave, etc.

Aujourd’hui, moins d’un tiers des habitants de notre planète vivent dans de vraies démocraties. Et celles-ci sont parfois en péril. L’extrême droite gagne du terrain, notamment en Europe. Et que deviendront les États-Unis si Trump est réélu ?

Le plus grave est que ces situations reflètent un soutien des populations à ces dégradations de l’état du monde. Restons en Suisse. L’intérêt de ce qui se passe dans notre pays réside dans son fonctionnement démocratique. Nous disposons de droits particuliers, avec le référendum et l’initiative. Ce qui revient à dire que, souvent, ce ne sont pas les pouvoirs politiques qui tranchent. Nombre de nos choix ne peuvent être imputés au pouvoir. Le résultat est désastreux, parfois même pire, que dans des pays où les décisions viennent d’en haut.

Depuis des décades, les citoyens helvétiques ont presque refusé tout progrès dans le domaine climatique. Les rares propositions acceptées sont si légères qu’elles ne permettront pas d’améliorer véritablement notre dynamitage de l’environnement. Sans parler de notre propension à refuser de voir les dégâts que nous commettons ailleurs. Deux exemples : le refus par le peuple de soutenir l’initiative pour des multinationales responsables et l’option retenue par Berne d’acheter des droits de polluer à des pays pauvres et donc moins polluants.

La majorité des humains, ici et ailleurs, refuse de modifier un tant soit peu notre mode de vie. Alors qu’il ne s’agit pas de retourner à l’âge de la bougie et que certaines de ces modifications seraient profitables à tout le monde, ou presque. Par exemple, simplement fermer les villes à la circulation privée (hormis évidemment certaines activités comme le transport de personnes handicapées, des livraisons lourdes, etc.). Des villes l’ont partiellement fait (ne citons que Copenhague) et ses habitants s’en portent mieux. Imaginez Genève sans voitures, la baisse de plusieurs pollutions (air, bruit), le retour d’espaces libres et conviviaux, le développement d’une nouvelle bio diversité, etc. mais, mission impossible. Faut-il rappeler que les Genevois avaient voté la création de 200 rues piétonnes. Ce qui aurait constitué un pas en avant. Las ! Lorsqu’il a fallu mettre ce projet en œuvre, entre la suppression de parkings pour les voitures et le coût de réaménagement desdites rues, un référendum a été lancé et le projet envoyé aux oubliettes.

J’en termine très provisoirement là pour ce premier billet en reprenant la question d’Emmanuel Carrère : raisonnablement optimiste ou radicalement pessimiste ? Réponse partielle dans un prochain numéro.

Patrice